La polyneuropathie, une affection qui touche les nerfs périphériques et provoque des symptômes variés tels que des picotements, des douleurs ou une perte de sensibilité, représente un véritable défi de santé publique au Mali. Une étude menée par M. Hamidou Arama au service de neurologie du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Gabriel Touré de Bamako met en lumière l’ampleur et la complexité de cette pathologie dans le contexte.
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Réalisée sur une période de 12 mois, de juin 2023 à mai 2024, cette étude a analysé les données de 59 patients diagnostiqués avec une polyneuropathie. Il s’agit d’une des rares recherches locales à s’intéresser de manière globale à cette affection, jusque-là principalement étudiée chez des sous-groupes spécifiques de patients.
67,8 % de femmes contre 32,2 % d’hommes
Les résultats montrent une prédominance féminine parmi les personnes atteintes, avec 67,8 % de femmes contre 32,2 % d’hommes. L’âge moyen des patients était de 50 ans, avec des cas allant de 25 à 77 ans, ce qui témoigne d’une large tranche de la population concernée. La paresthésie, sensation anormale comme des fourmillements ou des picotements a été le principal motif de consultation, représentant près de la moitié des cas (47,5 %). Parmi les causes identifiées, le diabète sucré arrive en tête, responsable de 28,81 % des cas de polyneuropathie. Ce chiffre souligne l’importance croissante du diabète dans les pathologies neurologiques. L’étude a également révélé que, sur les examens électroneuromyographiques (ENMG), l’atteinte axonale (endommagement des fibres nerveuses elles-mêmes) était la forme la plus fréquente, observée dans 51 % des cas.
Antidépresseur tricyclique
Sur le plan thérapeutique, l’association de la prégabaline, un médicament antalgique, et de l’amitriptyline, un antidépresseur tricyclique souvent utilisé pour les douleurs chroniques, a été le traitement le plus fréquemment prescrit. Ce choix reflète la complexité de la douleur neuropathique et la nécessité d’une approche multimodale. Les auteurs de l’étude soulignent que la polyneuropathie est en nette augmentation au sein du service de neurologie. Une croissance qui pourrait s’expliquer par une meilleure détection, mais aussi par la hausse des pathologies chroniques comme le diabète ou l’alcoolisme, souvent en cause dans les polyneuropathies.
Face à la diversité des causes et à la complexité de la prise en charge, les chercheurs plaident pour une approche pluridisciplinaire impliquant neurologues, diabétologues, médecins généralistes, kinésithérapeutes et parfois même psychologues. Le but : offrir aux patients un accompagnement global, du diagnostic au suivi.
Cette étude pionnière réalisée au CHU Gabriel Touré constitue une étape importante dans la compréhension et la gestion de cette maladie encore trop peu connue du grand public, mais aux conséquences parfois très invalidantes.
Fabrice NOUZIANYOVO