L’ONG Greenpeace a donné les résultats de plusieurs mois d’enquête dans un rapport inédit publié sur son site web, le 22 septembre 2025 2025; dans lequel elle soutient que des aliments sont contaminés à l’hexane, un solvant dérivé du pétrole utilisé par les géants de l’agro-industrie pour fabriquer des huiles végétales et des produits destinés à l’alimentation animale. A en croire Greenpeace, des tests réalisés en laboratoire universitaire et indépendant et commandités ont révélé la présence de résidus d’hexane, dans de beaucoup d’huiles végétales, mais aussi dans des aliments du quotidien issus des animaux comme le beurre, le lait - dont le lait infantile - ou le poulet. L’ONG alerte sur les risques majeurs pour la santé publique.
Des résidus d’hexane dans votre assiette !
L’hexane est un solvant toxique issu de la pétrochimie massivement utilisé par les agro-industriels pour extraire, à partir de graines de colza, de soja et de tournesol, des huiles végétales qui sont ensuite vendues en supermarché. En parallèle, cela permet d’obtenir des tourteaux déshuilés, extrêmement protéinés, à destination des animaux d’élevage. Des traces d’hexane se retrouvent alors, en bout de chaîne dans les produits issus des animaux qui ont consommé des tourteaux contaminés, comme le beurre et le lait, y compris infantile, ou encore dans la viande de poulet.
Ce solvant toxique pourrait être écarté des procédés industriels mais les rendements seraient moins élevés. Une option qui ne satisfait pas les géants de l’agro-industrie qui préfèrent continuer à utiliser l’hexane pour maximiser leurs profits au risque de contaminer nos assiettes.
Deux tiers des produits testés contaminés à l’hexane
Pour mieux éclairer sur l’ampleur du scandale, Greenpeace a fait réaliser par un laboratoire universitaire une série de tests sur plusieurs produits du quotidien : huiles de tournesol ou de colza, beurres, laits y compris infantiles, viande de poulet et tourteaux destinés à l’alimentation d’animaux d’élevage. Au total, sur 56 produits testés, de marques variées, 36 contenaient des résidus d’hexane :
• Huiles Isio 4 Lesieur
• Huiles Simply Carrefour
• Huiles Coeur de Tournesol Lesieur
• Huiles Fleur de Colza Lesieur
• Le beurre gastronomique doux Président
• Le beurre gastronomique demi-sel Président
• Le beurre tendre doux Elle & Vire
• Le beurre tendre demi-sel Elle & Vire
• Le beurre de Bretagne doux Les Croisés – Marque repère de Leclerc
• Le beurre moulé doux Paysan Breton
• Cuisses de poulet Monoprix
• Lait infantile Blédina de 1 à 3 ans
• Lait infantile Gallia de 1 à 3 ans
• Lait infantile en poudre Blédina de 6 à 12 mois
• Lait demi-écrémé Lactel
• Lait demi-écrémé Délisse – Marque Repère de Leclerc
« En tant que consommateurs et consommatrices, nous sommes potentiellement en contact très régulièrement et de manière diffuse avec ce solvant toxique. Que ce soit pour faire cuire nos aliments à l’huile, pour réaliser une vinaigrette, pour des tartines beurrées ou encore pour nourrir nos bébés : l’hexane se retrouve dans de nombreux produits alimentaires de notre quotidien, et cela fait peser des risques sur notre santé. Un scandale face auquel nous ne pouvons pas nous taire tant le danger sanitaire est bien réel », fait savoir Greenpeace.
Les dangers de l’hexane et comment est-il encadré ?
Les résultats des tests réalisés par Greenpeace sont alarmants car l’hexane peut être dangereux pour notre santé : ce solvant est reconnu comme toxique pour le système nerveux, comme potentiel perturbateur endocrinien et est suspecté d’être reprotoxique. Il est d’ailleurs classé comme substance CMR (cancérogène, mutagène, reprotoxique) par l’ECHA (Agence européenne des produits chimiques).
En termes de règlementation de l’utilisation de l’hexane dans les produits de grande consommation, elle date de près de 30 ans. Ce que l’ONG trouve faible et obsolète. « En 2024, l’Autorité européenne de sécurité a jugé ces données insuffisantes et inadéquates alors qu’elles servent encore de base à la réglementation actuelle », déplore l'organisation internationale, spécialisée dans les questions environnementales et la promotion de la paix.
Pire encore, souligne Greenpeace, la réglementation actuelle ne couvre pas l’ensemble des produits et notamment ceux d’origine animale. « Elle ignore donc la possible voie de contamination via les produits issus d’animaux ayant ingéré de l’hexane (beurre, viande, lait de vache y compris lait infantile) », insistent les responsables de l’ONG.
“Auxiliaire technologique”, non présence mentionnée sur l’étiquette
L’hexane est aujourd’hui classé comme un “auxiliaire technologique”, c’est pourquoi il n’est pas mentionné dans la liste des ingrédients sur l’étiquette de vos produits. « Résultat ? Des résidus d’hexane se retrouvent dans les huiles végétales mais aussi dans les produits issus des animaux qui auraient mangé des tourteaux contaminés sans que vous le sachiez. Vous n’avez aucun moyen de savoir, en lisant la liste des ingrédients, si vous ingérez de l’hexane ou non », confie Greenpeace.
Au cœur du scandale, le groupe agroalimentaire Avril
Greenpeace soutient que le scandale viendrait du géant de l’agro-industrie, groupe Avril. En effet, le groupe possède des marques très connues comme Lesieur et Puget. Il détient aussi la filiale Sanders, leader français de l’alimentation animale. Il a le quasi-monopole dans la filière française des oléo protéagineux : plus de la moitié des graines oléo-protéagineuses triturées en France sont transformées par Avril.
« Chez Avril, neuf graines sur dix sont transformées dans des usines utilisant de l’hexane. Ce solvant est particulièrement rentable : en utilisant l’hexane dans la très grande majorité de sa production, Avril peut extraire environ 97 % de l’huile de la graine, contre 89 % en recourant à l’extraction mécanique (sans hexane). Rentabilité maximale donc, quels qu’en soient les risques pour notre santé », relève l’ONG française.
C’est pourquoi, le Greenpeace appelle le gouvernement français à prendre ses responsabilités pour protéger sa population.
« Il ne peut rester passif face à cette contamination massive et invisible », exhorte l’ONG.
Rédaction