DECEMBER 9, 2022
Santé

Santé : Oui ! L’aspirine, ce vieux médicament avec un potentiel anti-cancéreux prometteur

Santé : Oui ! L’aspirine, ce vieux médicament avec un potentiel anti-cancéreux prometteur

Longtemps connue pour ses vertus anti-inflammatoires et cardioprotectrices, l’aspirine suscite désormais un intérêt croissant pour son rôle potentiel dans la prévention et la limitation de certains cancers.

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  •        Des chercheurs ont observé dès 1988 un lien entre consommation régulière d’aspirine et réduction du risque de cancer colorectal.
  •         Plusieurs mécanismes biologiques expliquent les effets anticancéreux supposés du médicament.
  •         Des méta-analyses suggèrent une baisse modérée de la mortalité liée au cancer, mais les résultats restent débattus.

 

Médicament vieux de plus d’un siècle

L’idée selon laquelle l’aspirine pourrait jouer un rôle dans la lutte contre le cancer a pris forme en 1988, grâce aux travaux de G.A. Kune, S. Kune et L.F. Watson, dans le cadre de la Melbourne Colorectal Cancer Study. Leur étude, publiée dans Cancer Research, a montré que les personnes prenant régulièrement de l’aspirine avaient un risque réduit de développer un cancer colorectal par rapport aux non-utilisateurs. Depuis cette découverte fondatrice, les recherches se sont multipliées pour explorer le potentiel anticancéreux de ce médicament vieux de plus d’un siècle. Les mécanismes biologiques proposés pour expliquer cet effet protecteur sont multiples. L’aspirine agit d’abord en inhibant les enzymes cyclo-oxygénases (COX), notamment COX-2, très active dans de nombreuses cellules tumorales. Cette enzyme est impliquée dans les processus inflammatoires qui favorisent la cancérogenèse. En réduisant l’inflammation chronique, l’aspirine modifie un terrain propice au développement de tumeurs. Elle agit aussi sur les plaquettes sanguines, en réduisant leur capacité à protéger les cellules tumorales circulantes. Ces plaquettes, en formant des caillots, peuvent aider les cellules cancéreuses à échapper au système immunitaire et à se fixer dans de nouveaux tissus, favorisant ainsi les métastases. En bloquant ce processus, l’aspirine pourrait donc ralentir la dissémination tumorale.

Réparation de l’ADN…

Mais ce n’est pas tout. Des études plus récentes suggèrent que l’aspirine pourrait jouer un rôle dans la réparation de l’ADN et l’induction de l’apoptose, c’est-à-dire la mort programmée des cellules anormales. Par exemple, une étude de D. Din et al. publiée en 2007 dans Carcinogenesis a montré que l’aspirine induit un arrêt du cycle cellulaire en phase G1 dans des cellules coliques, favorisant ainsi l’activation des points de contrôle cellulaires et l’apoptose. Une autre étude d’A. Stark et al., parue la même année dans le British Journal of Cancer, a mis en évidence que l’aspirine favorise la dégradation d’IκBα, la translocation nucléaire de NFκB, et l’apoptose dans les lignées cellulaires du cancer colorectal.

Concernant la progression tumorale et les métastases, plusieurs hypothèses restent encore à valider, mais les propriétés antiplaquettaires de l’aspirine font d’elle une piste sérieuse dans la prévention de la dissémination de certains cancers. Des méta-analyses récentes ont mis en lumière une réduction modérée de la mortalité liée au cancer chez les utilisateurs réguliers d’aspirine. Toutefois, ces résultats ne font pas l’unanimité : certaines études n’ont pas retrouvé ces effets protecteurs, soulignant la nécessité d’essais cliniques mieux contrôlés pour trancher la question.

Ce qu’il faut retenir sur l’aspirine et le cancer

v  Première grande étude : Melbourne Colorectal Cancer Study, 1988 (Cancer Research).

v  Types de cancer concernés : surtout colorectal, mais aussi œsophage, estomac, sein, prostate.

v  Mécanismes proposés : inhibition de COX-2, réduction de l’inflammation, action antiplaquettaire, stimulation de l’apoptose.

v  Limites : résultats inconstants, effets indésirables, et nécessité d’études supplémentaires.

 

Dr Mazo KONE

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