Depuis 2006, la rizipisciculture, une pratique combinant la culture du riz et l’élevage de poissons, s’installe progressivement au Mali. Cette méthode innovante permet de diversifier les sources de revenus pour les agriculteurs tout en optimisant l’utilisation des ressources naturelles. Cette étude menée par le Dr. Tiema Niaré, chef de programme à l’Institut d’Économie Rurale, en collaboration avec plusieurs chercheurs, a mis en lumière les impacts de cette pratique sur la productivité agricole et la fertilité des sols des rizières, spécifiquement dans la zone de l’Office du Périmètre Irrigué de Baguinéda dans une périphérie à Bamako.
-------------------------------------------
La rizipisciculture repose sur l’intégration de la culture du riz et de l’élevage de poissons dans un même espace de production. En combinant ces deux activités, le système permet aux agriculteurs d’améliorer la rentabilité de leurs terres tout en réduisant les coûts de production. Dans l’étude menée, seize champs ont été utilisés, dont douze aménagés pour la rizipisciculture et quatre réservés à la monoculture de riz. Cette expérimentation s’est étendue sur deux campagnes agricoles, 2013-2014 et 2015-2016.
Une productivité qui varie, mais reste prometteuse
L’étude a mesuré les rendements en riz et en poissons, en fonction des différentes conditions expérimentales. Les variétés de riz cultivées étaient ADNY-11, BG 90-2, et Seberang MR 77, adaptées aux conditions locales. En ce qui concerne les rendements de riz, les résultats ont varié d’une année sur l’autre, oscillant entre 1,92 t/ha et 3,72 t/ha. Bien que les moyennes ne soient pas statistiquement différentes, ces chiffres montrent une stabilité de la production de riz, malgré les variations d’alimentation des poissons. Le rendement des poissons, quant à lui, a montré une plus grande variation, allant de 0,41 t/ha à 0,89 t/ha durant la campagne 2015-2016. Cette diversité de rendements démontre l’impact de la rizipisciculture sur l’amélioration des sources de revenus pour les paysans, notamment en diversifiant la production agricole. Un autre aspect clé de l’étude concerne l’impact de la rizipisciculture sur la fertilité des sols. Grâce aux excréments des poissons riches en azote et en phosphore, la rizipisciculture contribue à améliorer la qualité du sol des rizières. Les nutriments issus des résidus d’aliments non consommés par les poissons dissous dans l’eau apportent également une valeur ajoutée à la terre, permettant de réduire la dépendance à des engrais chimiques coûteux.
Plan financier et nutritionnel
Sur le plan financier et nutritionnel, la rizipisciculture présente des avantages indéniables. Les agriculteurs bénéficient non seulement de la vente de riz mais aussi de la production de poissons, ce qui diversifie leurs sources de revenus et améliore la sécurité alimentaire. De plus, cette méthode peut réduire les risques liés à la monoculture, tout en permettant une meilleure gestion des ressources en eau et en sol. Le Mali dispose de grandes potentialités pour développer la rizipisciculture à grande échelle. Selon les chercheurs, cette méthode combinée pourra jouer un rôle important dans l’augmentation de la productivité agricole tout en préservant l’environnement et en contribuant à la sécurité alimentaire du pays. Si elle est bien encadrée, la rizipisciculture s’imposera comme une solution durable et rentable pour les agriculteurs maliens.
Les résultats de cette étude ouvrent la voie à des perspectives enthousiastes pour le secteur agricole du Mali, en particulier pour la riziculture, qui demeure l’une des principales sources de subsistance pour de nombreuses familles rurales. Les autorités agricoles et les acteurs du développement sont invités à soutenir et à promouvoir la rizipisciculture comme une alternative viable pour améliorer la productivité et la fertilité des sols dans le pays.
Quelques sources bibliographiques
Niaré, T., et Kalossi, M. (2014). La rizipisciculture au Mali : Pratiques et perspectives de l’innovation piscicole. Tropicultura, 32(3), 121-128.
Kolani, L., et Mawuena, Y. I. (2022). Analyse des déterminants de la productivité agricole au Togo.
FIDA, (2021). L’avenir de l’agriculture au Mali, 2030-2063 – Etude de cas : Défis et Opportunités pour les projets financés par le FIDA.
Rakotondramiadana, M. F. (2019). La rizipisciculture : Un modèle agroécologique innovant et efficient pour Madagascar. Thèse de Doctorat, Université d’Antananarivo, 33p.
Yaï, D. E., Yabi, J. A., Biaou, G., Anne Floquet, A., et Degla, P. (2020). Productivité agricole et sécurité alimentaire des ménages agricoles du Département de l’Atacora au Bénin. Revue Africaine d’Environnement et d’Agriculture : 3(2), 17- 27.
Fabrice NOUZIANYOVO