DECEMBER 9, 2022
Edito

Souveraineté alimentaire en Afrique de l’Ouest : L’urgence d’un modèle résilient

Souveraineté alimentaire en Afrique de l’Ouest : L’urgence d’un modèle résilient

L’Afrique de l’Ouest est à la croisée des chemins. Face à la montée des crises climatiques, aux pressions démographiques et aux défis sécuritaires, la souveraineté alimentaire est devenue un enjeu stratégique pour la région.

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Le Mali et la Côte d'Ivoire, malgré leurs trajectoires économiques différentes, illustrent les tensions et opportunités qui façonnent cette bataille pour l’autosuffisance.

 

Mali : entre insécurité et dépendance aux importations

Le Mali, vaste territoire sahélien, est marqué par une forte dépendance aux importations alimentaires. La conjugaison du changement climatique, des conflits armés dans le Centre et le Nord, et des difficultés d’accès aux intrants agricoles fragilise la production nationale. L’autosuffisance en céréales, jadis une ambition portée par des pro- grammes agricoles nationaux, s’effrite face aux défis sécuritaires.

 

Les cultures vivrières peinent à répondre aux besoins locaux.

Le riz, produit massivement dans l’Office du Niger, est de plus en plus concurrencé par les importations asiatiques. Le mil et le sorgho, piliers de l’alimentation sahélienne, souffrent des sécheresses récurrentes. L’instabilité politique limite les investissements dans l’agro-industrie, et les agriculteurs sont souvent contraints à l’exode ou à l’abandon de leurs exploitations. Dans ce contexte, Les initiatives locales doivent être renforcées. L’émergence de coopératives agricoles, le soutien à l’agriculture irriguée et la valorisation des productions locales (niébé, fonio) sont des pistes prometteuses. Mais elles nécessitent une volonté politique ferme et un accompagnement technique structurant.

 

Côte d’Ivoire : paradoxe d’un géant agricole en quête d’auto- suffisance vivrière

Puissance agricole, la Côte d’Ivoire domine le marché mon- dial du cacao et de l’anacarde, mais peine à garantir une sécurité alimentaire durable à sa population. L’exportation massive de cultures d’exportation a long- temps éclipsé l’enjeu d’une production vivrière suffisante. Or, la dépendance aux importations de riz (près de 60 % de la consommation nationale) ou de blé fragilise le pays face aux fluctuations des prix mondiaux.

Le gouvernement ivoirien a multiplié les initiatives pour inverser la tendance. Le Programme national d’autosuffisance en riz (PNAR) ambitionne de réduire la dépendance aux importations d’ici 2030. La diversification agricole est encouragée, avec un retour en force du manioc, de l’igname et du maïs, tandis que l’essor de l’agro-industrie attire des investissements dans la transformation locale. Mais ces efforts doivent s’intensifier. L’accès à la terre pour les petits producteurs, la modernisation des techniques agricoles et la lutte contre l’artificialisation des sols restent des défis majeurs. La Côte d’Ivoire doit aussi renforcer ses circuits de distribution et promouvoir des habitudes de consommation tournées vers les productions locales.

Un impératif pour l’Afrique de l’Ouest Au-delà du Mali et de la Côte d’Ivoire, la souveraineté alimentaire en Afrique de l’Ouest exige une approche régionale coordonnée. Les organisations sous-régionales doivent jouer un rôle central dans la régulation des marchés agricoles, le partage des innovations agroécologiques et la mise en place de politiques d’appui aux filières stratégiques.

Face aux incertitudes économiques et géopolitiques, l’Afrique de l’Ouest ne peut plus se permettre d’être vulnérable aux importations alimentaires.

Il est temps d’inverser la tendance, en misant sur une agri- culture résiliente, une trans- formation locale accrue et une consommation responsable. La souveraineté alimentaire ne doit pas être un slogan, mais une priorité absolue.

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