Mali: 83 personnes tuées par la mauvaise qualité de l’air à Bamako
La mauvaise qualité de l’air est la deuxième cause d’admission la plus importante dans les hôpitaux de Bamako après le paludisme. Des scientifiques, à travers une étude intitulée «Étude de la qualité de l’air à Bamako (Mali) », ont fait le diagnostic de l’état de la qualité de l’air dans la ville et ont évalué les impacts sanitaires sur les populations.
Plus de 260 000 personnes fréquentent les hôpitaux de Bamako chaque année, pour bénéficier de soins contre les pathologies respiratoires. En 2018, les autorités sanitaires ont présenté un bilan de 83 décès uniquement liés aux maladies respiratoires. «Et la plupart des causes principales de ces maladies sont associées à la qualité de l’air respirée», soutient l’équipe de scientifiques, constituée d’experts nationaux et internationaux, dans leur étude présentée le mercredi 02 octobre, lors de la Semaine européenne de la diplomatie climatique à Bamako.
Les poussières en suspension constituent la pollution atmosphérique principale de Bamako. Selon l’étude, cette pollution est due au trafic automobile (y compris les deux roues), en partie par les émissions directes venant de leurs moteurs à combustion, mais surtout par la mise en suspension de particules provoquées par leur circulation sur des voies poussiéreuses. La forte consommation de bois de chauffe est également un des grands responsables de la pollution de la ville.
Grace à des outils des diagnostiques dont: une campagne de mesures des concentrations atmosphériques et de collecte des principaux polluants responsables de la dégradation de la qualité de l’air, l’équipe scientifique a pu cartographier la qualité de l’air sur la ville à partir de la modélisation.
La concentration moyenne annuelle mesurée en particules PM10 (particule en suspensions) est de 331 microgrammes par mètre cube (µg/m3), avec des pointes journalières dépassant 900 µg/m3 alors que la norme journalière de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est de 50 µg/m3. En appliquant les formules de l’OMS, on estime que l’augmentation de la mortalité à Bamako due aux poussières est comprise entre 19 et 27 %.
Globalement, « nous avons constaté que la pollution par le dioxyde de soufre reste très faible en raison de la faible utilisation de fioul lourd à Bamako et d’une activité industrielle restreinte. La pollution par les oxydes d’azote reste à des niveaux acceptables, mais la croissance du parc automobile devrait rendre cette pollution préoccupante dans les années à venir», expose Boubacar Diakité, Directeur adjoint de la Direction nationale de l’assainissement du contrôle des pollutions et des nuisances de Bamako. Cependant, La pollution par les composés organiques volatils et en particulier par le benzène est très préoccupante.
En effet, les niveaux relevés sur le site de la municipalité en centre-ville de Bamako sont supérieurs à la valeur limite européenne fixée 5 µg/m3 en moyenne annuelle pour le benzène. Cette pollution est en grande partie due aux motos à moteurs deux temps. Le benzène est un polluant atmosphérique reconnu cancérigène et selon les résultats des études scientifiques réalisées sur ce thème, il a été estimé que le benzène provoquerait un excès de risque collectif d’environ 215 cancers/an à Bamako. Si rien n’est fait, en 2020 le nombre de cancers liés au benzène passera à 686 cas et l’augmentation de la mortalité due aux poussières à un chiffre moyen de 38,7%.
Pour limiter ces impacts sanitaires, l’équipe scientifique propose entre autre l’adoption de normes de qualité pour les essences et les huiles ; le développement d’un laboratoire national des carburants au sein de l’Office national des produits pétroliers (ONAP) ; l’adoption des normes Euro, ou limitation de l’importation de véhicules trop anciens ; le remplacement des motos 2 temps par des motos 4 temps ; la mise en œuvre d’un plan de déplacements urbains, le revêtement de la voirie et le développement de transports en commun.
Mardochée BOLI | JSTM.ORG
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