Les raisons des faibles taux de COVID-19 en Afrique révélées
Une étude réalisée par l’organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre inhabituellement bas de cas et de décès dus à la COVID-19 en Afrique pourrait s’expliquer par une population jeune et clairsemée et le climat chaud et humide qui ont interagi pour renforcer leurs effets individuels respectifs.
En mai, l’OMS avait prédit que jusqu’à 190 000 personnes pourraient mourir et jusqu’à 44 millions d’autres seraient infectées par le nouveau coronavirus en Afrique au cours de la première année de la pandémie, si les mesures d’endiguement échouaient.
Au cours des quatre dernières semaines, seulement 77 147 nouveaux cas de COVID-19 ont été signalés, contre 131 647 enregistrés au cours des quatre semaines précédentes, selon les dernières statistiques du bureau régional de l’OMS pour l’Afrique.
« L’Afrique n’a pas été témoin d’une propagation exponentielle de la COVID-19 comme beaucoup le redoutaient initialement », déclare Matshidiso Moeti, directeur régional de l’OMS pour l’Afrique. « Mais la propagation plus lente de l’infection dans la région signifie que nous nous attendons à ce que la pandémie continue de couver pendant un certain temps, avec des poussées occasionnelles », dit-elle.
“L’Afrique n’a pas été témoin d’une propagation exponentielle de la COVID-19 comme beaucoup le redoutaient initialement” | Matshidiso Moeti, directeur régional de l’OMS pour l’Afrique
Selon les Centres africains de contrôle et de prévention des maladies, depuis que le continent a enregistré son premier cas en février, près de 1,5 million de cas de COVID-19 et 35 750 décès ont été signalés en Afrique au 29 septembre 2020.
Les preuves montrent de plus en plus que les cas de COVID-19 concernent principalement des personnes âgées de plus de 60 ans. En Afrique, l’âge médian de la population est de 19,4 ans, 60% de la population ayant moins de 25 ans.
Malgré le faible nombre de cas sur le continent, Matshidiso Moeti met en garde les pays africains contre la complaisance. « D’autres régions du monde ont connu des tendances similaires avant de constater qu’à mesure que les précautions sociales et de santé publique sont assouplies, le nombre de cas recommence à augmenter », dit-elle.
Monica Musenero, épidémiologiste et principale conseillère du président de l’Ouganda en matière d’épidémies, dit que les chances pour que l’Afrique puisse être le prochain épicentre de la COVID-19 sont élevées, malgré les faibles taux actuels d’infection et de mortalité.
Le virus a eu des épicentres changeants, commençant en Chine en décembre 2019 avant de se déplacer vers l’Europe, puis les Amériques ; mais il a continué d’évoluer en Afrique, décrit Monica Musenero.
« Au début, un certain nombre de pays ont procédé à des confinements, y compris des fermetures d’aéroports. Ces interventions sur le terrain ont en grande partie entraîné un ralentissement de la propagation », explique cette dernière à SciDev.Net. Elle prévient que de nombreux pays africains commencent maintenant à assouplir les mesures préventives à leurs risques et périls.
Désinformation
Leonard Mboera, chercheur principal du Centre pour la surveillance des maladies infectieuses en Afrique australe, remet en question les méthodes utilisées pour collecter les données sur la COVID-19 en Afrique.
« En raison de la désinformation généralisée sur la COVID-19, il est peu probable que la plupart des personnes infectées par le virus recherchent des soins auprès des établissements de santé conventionnels et ils ne sont donc pas pris en compte par les systèmes », explique Leonard Mboera.
« La plupart des établissements de santé sont tenus de soumettre leurs rapports hebdomadaires et mensuels aux districts et aux ministères [de la santé]. Ils le font, mais si vous vérifiez les données soumises, elles sont de très mauvaise qualité, avec un diagnostic, un âge ou un sexe manquants et parfois ce qui est soumis est différent de ce qui est disponible dans l’établissement », ajoute-t-il.
En l’absence de données de test approfondies, le véritable fardeau de la maladie reste incertain dans certains pays.
« Alors que les gouvernements ont fait des efforts pour améliorer les tests de la COVID-19, avec des tests récents passant de 74 tests cumulés pour 10 000 personnes le 23 août à 93 pour 10 000 personnes le 21 septembre dans 44 pays évalués, le niveau demeure faible », affirme l’OMS.
Tanimola Akande, professeur de santé publique à l’université d’Ilorin au Nigéria, explique que le manque de tests en Afrique est attribué à la faible densité des installations de test, à une recherche des contacts inadéquate et à une mauvaise attitude du public face à la pandémie.
« Il y a beaucoup de sous-déclaration des cas symptomatiques », conclut Tanimola Akande.
Source: SciDev.Net (partenaire du JSTM)