Le dragage, un phénomène qui tue les cours d’eau au Mali
Le dragage est un mécanisme d’extraction, par drague, des minéraux sous l’eau. Au Mali, la drague est employée pour l’exploitation de l’or dans les cours d’eau. Le dragage cause d’énormes dégâts à l’environnement et contribuent directement à la dégradation des cours d’eau.
Contamination de l’eau par des produits chimiques, l’altération de la qualité de l’air par des odeurs d’hydrocarbure, le déséquilibre de la faune et de la flore aquatique. L’exploitation de l’or sur un fleuve agit physiquement et chimiquement sur ce fleuve et son biotope, indique Dr Sékou Sako, hydrobiologiste à la Faculté des Sciences et Techniques de Bamako (FST). La drague, explique l’enseignant-chercheur, creuse profondément dans le lit du fleuve. Cela entraine des changements géomorphologiques du littoral et provoque la destruction physique d’habitats de plusieurs espèces d’être vivants. Certaines espèces s’adaptent mais la plupart disparaissent.
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Deux types de dragues opèrent sur les cours d’eau au Mali, assure Moussa Diamoye, Directeur adjoint de l’Agence du Bassin du Fleuve Niger (ABFN). Il s’agit de la drague suceuse ou aspiratrice et la drague à codet. La drague suceuse ou aspiratrice est une machine flottante équipée d’une pompe aspiratrice avec un moteur ou deux. Elle est fabriquée au Mali. Importée d’Asie, la drague à codet creuse et rejette dans l’eau, en moyenne, 75 tonnes de gravier et de blocs rocheux en une seule tournée circulaire en 20 minutes maximum. Elle provoque des monticules et des îlots dans le lit des cours d’eau et accélère ainsi le phénomène de l’envasement des cours d’eau.
Ces machines répandent des produits chimiques notamment le mercure, le cyanure, l’huile de moteur, du gasoil, de l’essence… Ces éléments toxiques changent la composition chimique du milieu hybride et le rendent impropre. Cette introduction des éléments chimiques au sein de l’écosystème entraine entre autres: un déséquilibre sur la faune et la flore aquatique, le ralentissement ou l’arrêt de la reproduction chez certaines espèces. Aussi, l’eau une fois polluée par les produits chimiques entraine la disparition de phytoplancton, fournisseur du fleuve en oxygène et base de la chaîne alimentaire. Car, la diminution du phytoplancton entraine la non-prolifération du zooplancton.
Suite à la pluie diluvienne du 16 Mai 2019, des milliers de poissons ont été retrouvés morts dans le fleuve Niger, aux environs de Bamako. Le Gouvernement a annoncé dans un premier temps que la consommation de ces poissons est sans danger pour la santé humaine. Depuis les analyses effectuées par le Laboratoire Central Vétérinaire (LCV) dont les résultats n’ont jamais été rendus publics, les mesures de suspension de toute activité aurifère sur les fleuves et les cours d’eau, ont été appliquées pour une période de 12 mois. Mieux, la ministre des Mines promet, désormais, d’endiguer le phénomène du dragage au Mali.
Omar Sissoko