La vitesse fulgurante à laquelle s’est propagée l’épidémie de coronavirus en Italie pourrait s’expliquer en partie par la pollution, selon une étude de la Société italienne de médecine environnementale (Sima). Les médecins, qui ont collaboré avec les universités de Bari et de Bologne, ont mis en parallèle les nouveaux cas de contagion au Covid-19 et les dépassements des limites légales pour les concentrations de particules fines PM10 dans les différences provinces italiennes enregistrés entre le 10 et le 29 février — en prenant en compte le temps d’incubation du virus.

Une accélération anormale de l’épidémie dans le nord de l’Italie

« Dans la vallée du Pô, on observe une “accélération anormale” de l’expansion de l’épidémie correspondant à une forte concentration de particules fines deux semaines plus tôt, indique Leonardo Setti, de l’Université de Bologne, au journal La RepubblicaLa poussière fait ainsi office “d’autoroute” pour le virus ».

L’effet est particulièrement marqué dans les provinces où ont démarré les premiers foyers d’infection, notent les chercheurs. Brescia, l’une des villes les plus polluées du pays, figure ainsi parmi les villes les plus frappées par l’épidémie. À l’inverse, Rome, où des cas de coronavirus ont été découverts en même temps que dans le nord du pays, a connu une propagation de la maladie bien plus lente.

On observe une forte corrélation entre le niveau de pollution aux particules PM10 et le nombre de contaminations (cartes à droite) 15 jours plus tard. © Sima  

La distance de sécurité d’un mètre remise en cause ?

Mais ce n’est pas tout. « En plus d’être un vecteur de l’épidémie, les particules fines constituent un substrat qui permet au virus de rester dans l’air dans des conditions viables pendant plusieurs heures voire plusieurs jours », affirment les chercheurs. Ce qui remettrait en cause les mesures de précaution instaurées par les pouvoirs publics. « La distance actuelle considérée comme sûre (un mètre) n’est sans doute pas suffisante », avance ainsi Alessandro Miani, président de la Sima, dans le quotidien Il Sole 24 Ore.

84 % de risques en plus de mourir dans les zones polluées

Outre leur rôle dans la propagation des épidémies, la pollution est également un facteur fragilisant de l’état de santé. Elle augmente le risque d’accident vasculaire cérébral, de cardiopathie, de cancer du poumon et de maladies respiratoires aiguës. Une étude de l’Inserm a également montré qu’une forte concentration en particules fines est étroitement associée à une sévérité accrue des rhinites. La pollution entraînerait aussi un dysfonctionnement du système immunitaire, rapporte l’Anses. En 2003, une étude portant sur l’épidémie de SRAS en Chine soulignait déjà que les patients vivant des zones polluées avaient 84 % de risques en plus de mourir que dans d’autres régions moins exposées à la pollution.

Le beau temps, facteur aggravant de la pollution

Afin de freiner l’épidémie, il faut « réduire les émissions de particules au minimum et espérer une météorologie favorable », insiste Alessandro Miani. Ces derniers jours, une chute drastique de la pollution a été observée en Italie due aux mesures de confinement et de restrictions de la mobilité. Cette baisse devrait logiquement aboutir à une diminution de la propagation, espèrent les chercheurs. « D’après les données dont nous disposons, nous nous attendons à une stabilisation du nombre de personnes infectées entre le 25 mars et le 15 avril », estiment les chercheurs sur le site de la Rai.

Pas gagné… À Paris, la mise en place du confinement n’a pas empêché une dégradation de la qualité de l’air. Entre le 5 et le 18 mars, le taux de particules PM10 a même triplé dans la capitale, en raison notamment du beau temps et du manque de vent.

futura-sciences.com