Faire de la recherche expérimentale en Afrique
Une session de la conférence YASE était consacrée à l’épineuse question de la recherche expérimentale. les différents intervenants livrent ici leurs points de vue. Voir la vidéo sur Afriscitech
Veronica Okello, Université de Machakos, Kenya
Il y a beaucoup de défis à relever. Je ne parlerais pas de difficultés, mais plutôt de défis. L’un d’entre eux est que nous n’avons pas d’équipements. Nous avons les connaissances, mais nous n’avons pas les équipements.
Alpha Kabinet Keita, Université de Montpellier et Centre d’études, de recherche et de formation en infectiologie de Guinée
Le premier laboratoire que j’ai eu la chance de monter en Guinée, c’est à l’Institut national de santé publique. Ce laboratoire a été monté dans un contexte assez particulier. Pendant l’épidémie de la maladie à virus Ebola, il y a eu beaucoup d’institutions qui sont venues en aide à la Guinée. Et ces institutions ont laissé du matériel dans le pays. Et même, avant, il y avait du matériel laissé dans le pays, qui était inutilisé. Et en me rendant compte qu’il y avait beaucoup de choses sur place, nous avons monté un laboratoire. Et maintenant ce qu’on ne pouvait pas trouver sur place, c’est ça qui a été acheté en Europe et acheminé en Guinée.
François Piuzzi, Association pour la Promotion Scientifique de l’Afrique
Les défis c’est d’avoir du matériel, et du matériel qui marche longtemps. Il y a le problème des consommables, le problème des pannes, des pièces détachées, et ça c’est pratiquement insurmontable.
Arouna Darga, Sorbonne Université
Il faut former les jeunes, les chercheurs, pour qu’ils puissent, même s’ils ont accès à des sources de financement qui leur permet d’accéder au matériel, qu’ils puissent maintenir ces instruments là et les réparer quand ils sont en panne.
Veronica Okello
L’avenir est prometteur. Quand je suis revenue au Kenya, je me suis cru perdue. Je pensais que j’allais rester chez moi et ne rien faire. Mais depuis deux ans que je suis au Kenya, j’ai fait un travail remarquable, grâce à des subventions internationales que j’ai obtenues. Elles ont amélioré ma visibilité au sein de l’université, de sorte que la direction s’est impliquée. Cela qui m’a permis d’obtenir des fonds localement, qui à leur tour m’ont permis d’impliquer davantage mes étudiants.
Alpha Kabinet Keita
Ce qui a été peut être simple dans mon cas, parce que j’ai commencé à mettre le laboratoire à la suite de l’épidémie, qui était un phénomène qui a attiré le regard du monde entier sur le pays, peut paraître très difficile pour quelqu’un d’autre qui n’a pas pu bénéficier de l’opportunité, excusez moi de le dire comme ça, qui n’a pas pu bénéficier de l’opportunité d’une épidémie par exemple.
Arouna Darga
C’est ce que nous faisons par exemple au GeePs, donc on achète des instruments, pour un but donné, et ensuite on les transforme, pour en développer des nouvelles techniques. Et là je pense que c’est un défi pour la recherche expérimentale en Afrique.
François Piuzzi
Surtout, mon espoir, c’est que ça se fasse directement en Afrique, c’est-à-dire qu’il n’y a plus besoin d’importer des choses, donc pas de taxes d’importation, ça peut être réparé sur place, ça n’a pas besoin d’être déplacé. Ca c’est mon espoir.
Veronica Okello
Une autre chose à faire est d’impliquer les directions des universités. Elles devraient réserver une partie du budget, chaque année, pour acheter des instruments. Et ensuite seulement compter sur les donateurs internationaux : nous devons d’abord trouver nos propres solutions.
Propos recuellis par Jean-François Haït/Afriscitech.com