COVID-19: Le variant Omicron a-t-il existé premièrement en Afrique du Sud ? Un groupe de scientifique prouve le contraire
D’où venait Omicron ? Une étude publiée dans Science met en lumière les origines de la variante du SRAS-CoV-2 en Afrique.
— Communiqué de presse — Découverte il y a un an en Afrique du Sud, la variante du SRAS-CoV-2, plus tard appelée « Omicron », s’est propagée à travers le monde à une vitesse incroyable. On ne savait toujours pas exactement COMMENT, QUAND et OÙ ce virus a pris naissance. Pourtant, une étude publiée dans la revue Science* par un groupe de chercheurs parmi lequel figurent ceux du Laboratoire de Biologie Moléculaire Appliquée (LBMA) de l’Université des Sciences, des Techniques et de Technologies de Bamako (USTTB) au Mali” montre que les prédécesseurs d’Omicron existaient sur le continent africain bien avant que des cas ne soient identifiés. Ce qui suggère qu’Omicron a émergé progressivement sur plusieurs mois dans différents pays d’Afrique.
Depuis le début de la pandémie, le coronavirus est en constante évolution. Le plus grand bond observé dans l’évolution du SRAS-CoV-2 à ce jour a été observé par les chercheurs en 2021, quand une variante a été découverte qui différait du génome du virus original par plus de 50 mutations. Détectée pour la première fois chez un patient en Afrique du Sud à la mi-novembre 2021, la variante nommée Omicron BA.1 s’est propagée dans 87 pays dans le monde en quelques semaines seulement. À la fin de décembre de la même année, elle avait remplacé le variant Delta, qui était auparavant dominant dans le monde. Au Mali, grâce au réseau de laboratoires de surveillance établi en collaboration avec les sites miniers, l’équipe du Prof. Koïta a mis en évidence la présence d’omicron au mois d’Août 2021 deux mois avant son identification l’équipe sud-africaine.
Depuis, les spéculations sur l’origine de cette variante hautement transmissible se sont concentrées autour de deux théories principales : soit le coronavirus est passé d’un humain à un animal où il a évolué avant d’infecter à nouveau un humain comme Omicron, soit le virus a survécu plus longtemps chez une personne dont le système immunitaire est affaibli et c’est là que les mutations se sont produites. Une nouvelle analyse des échantillons de COVID-19 prélevés en Afrique avant la première détection d’Omicron jette maintenant le doute sur ces deux hypothèses.
L’analyse a été réalisée par une équipe de recherche internationale composée d’éminents chercheurs dont le Professeur Ousmane Koïta du Laboratoire de Biologie Moléculaire Appliquée (LBMA), du Professeur Jan Felix Drexler, scientifique à l’Institut de virologie de Charité et au Centre allemand de recherche sur les infections (DZIF). L’Université Stellenbosch en Afrique du Sud et le Laboratoire de la fièvre hémorragique virale (LFHB) au Bénin figurent parmi les autres partenaires clés du réseau euro-africain.
Les scientifiques ont commencé par développer un test PCR spécial pour détecter spécifiquement la variante BA.1 d’Omicron. Ils ont ensuite analysé plus de 13 000 échantillons respiratoires de patients atteints de la COVID-19 prélevés dans 22 pays africains dans la période allant du milieu de 2021 au début de 2022. Ce faisant, l’équipe de recherche a découvert des virus porteurs de mutations propres à Omicron chez 25 personnes de six pays différents qui ont contracté la COVID-19 en août et en septembre 2021, soit deux mois avant que le variant ne soit détecté pour la première fois en Afrique du Sud.
Pour en apprendre davantage sur les origines d’Omicron, les chercheurs ont également décodé ou « séquencé » le génome viral de quelques 670 échantillons. Ce séquençage a permis de détecter de nouvelles mutations et d’identifier de nouvelles lignées virales. L’équipe a découvert plusieurs virus qui présentaient divers degrés de similitude avec Omicron, mais ils n’étaient pas identiques. « Nos données montrent qu’Omicron avait des ancêtres différents qui interagissaient entre eux et circulaient en Afrique, parfois simultanément, pendant des mois », explique le Professeur Drexler. « Cela donne à penser que la variante BA.1 d’Omicron a évolué graduellement, au cours de laquelle le virus s’est de plus en plus adapté à l’immunité humaine existante », complète professeur Koïta. De plus, les données de la PCR ont amené les chercheurs à conclure que même si Omicron n’était pas originaire uniquement d’Afrique du Sud, il y dominait d’abord les taux d’infection avant de se propager du sud au nord à travers le continent africain en quelques semaines seulement.
« Cela signifie que la montée soudaine d’Omicron ne peut être attribuée à un saut du règne animal ou à l’émergence d’une seule personne immunodéprimée, bien que ces deux scénarios aient peut-être également joué un rôle dans l’évolution du virus », déclare le Professeur Drexler. « Le fait qu’Omicron nous ait pris par surprise est plutôt dû à l’angle mort diagnostique qui existe dans de grandes parties de l’Afrique, où seulement une petite fraction des infections par le SRAS-CoV-2 sont probablement enregistrées. L’évolution progressive d’Omicron a donc été simplement négligée. Il est donc important que nous renforcions considérablement les systèmes de surveillance diagnostique sur le continent africain et dans des régions comparables du Sud, tout en facilitant le partage mondial des données. Seules de bonnes données peuvent empêcher les décideurs de mettre en œuvre des mesures de confinement potentiellement efficaces, telles que des restrictions de voyage, au mauvais moment, ce qui peut finir par causer plus de tort économique et social que de bien»
*Fischer C et coll. Gradual emergence followed by exponential spread of the SARS-CoV-2 Omicron variant in Africa. Science 2022 déc. 01. doi : 10.1126/science.add8737
Contact :
Prof Ousmane Koïta
Laboratoire de Biologie Moléculaire Appliquée
Courriel : ousmane.koita@lbma.edu.ml
Université des Sciences, Techniques et de Technologies de Bamako