Au Mali, le paludisme chez la femme enceinte peut être évité: les explications du Pr Kassoum Kayentao
Le paludisme chez la femme enceinte représente, selon l’OMS, un «problème de santé publique majeur». En cette saison des pluies, période propice à la transmission du paludisme, JSTM a adressé un questionnaire à l'Unité Paludisme et Grossesse du Malaria Research and Training Center. Les questions ont été répondues par Pr Kassoum Kayentao, l’adjoint au Chef de l’Unité Paludisme et Grossesse.
Au Mali, quelle est la prévalence du paludisme chez les femmes enceintes ?
Les données de recherche collectées dans 9 districts sanitaires du Mali en 2014, indiquent une prévalence du paludisme infection de 15.3% chez la mère et de 13.3% dans le placenta (Kayentao et al, 2014). Cependant, ces données ne peuvent pas être extrapolées à la population générale des femmes enceintes du Mali.
Quels sont les risques encourus par une femme enceinte atteinte du paludisme?
Les risques de l’infection palustre pendant la grossesse sont immenses et variés et dépendent de plusieurs facteurs dont le niveau d’endémicité, l’âge de la grossesse, la parité et l’immunité de la femme. Chez la mère, ils sont entre autres : l’anémie maternelle, le paludisme non compliqué, paludisme grave, la mort. Chez le fœtus, il s’agira d’avortement, de mort in utero, de prématurité, de faible poids de naissance.
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Pour lutter contre le paludisme, le MRTC a participé à l’adoption par l’OMS du Traitement préventif intermittent du paludisme (TPI) chez les femmes enceintes. En quoi consiste-t-il?
C’est une stratégie qui consiste à administrer au moins 3 doses de Sulfadoxine-Pyrimethamine (SP) pendant toute la grossesse à partir du deuxième trimestre de la grossesse (13e SA), avec au moins un mois d’intervalle entre les doses. Ces doses peuvent être administrées sans manger et sont sans danger pour la mère et le fœtus. Elles peuvent être administrées même le jour de l’accouchement.
Le TPI a-t-il contribué à réduire la prévalence de ce type de paludisme au Mali?
Les résultats des essais cliniques réalisés au Mali et ailleurs indiquent une réduction de 29% (10%-44%) pour l’infection maternelle et de 31% (20%-39%) pour l’infection placentaire, lorsque les deux doses sont comparées à 3 doses ou plus de SP (Kayentao et al, 2013). Au Mali cette réduction est de 47% (25%-63%) pour l’infection maternelle et de 52% (29%-68%) l’infection placentaire, dans le district sanitaire de Bla selon une étude réalisée en 2011 (Diakite & Kayentao, 2011).
Toutes les femmes enceintes sont-elles susceptibles de souffrir du paludisme?
Oui ! Toutes les femmes enceintes peuvent souffrir de paludisme, mais les premières et les deuxièmes gestes sont plus à risque du paludisme et de ses conséquences néfastes que les autres.
Au Mali, la femme enceinte peut éviter le paludisme en dormant sous moustiquaire imprégnée d’insecticide et en prenant la SP en TPI.
Peut-on éradiquer le paludisme à l’absence d’un vaccin ?
On est tenté de dire « non », si l’on se réfère à l’histoire des maladies infectieuses éradiquées (variole) ou en voie d’éradication (poliomyélite). Cependant, Oui ! C’est possible, car plusieurs pays l’ont éradiqué sans vaccin.
Aussi dans le cas du paludisme, une bonne implémentation des stratégies de prévention (TPI), d’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticides, la pulvérisation intra domiciliaire (PID) et du diagnostic précoce suivi du traitement des cas pourrait conduire à une réduction à zéro de l’incidence mondiale du paludisme. Dans ce cas on parle « d’élimination du paludisme ».
Toutefois, la disponibilité d’un vaccin antipaludique pourrait accélérer ce processus d’élimination voire d’éradication à l’échelle mondiale.
Attention: La reprise de cet article, même partielle, sans l’autorisation écrite du JSTM est passible de poursuite judiciaire.
Propos recueillis par Mariama Diallo|JSTM.ORG