Alimentation de rue à Bamako: Saviez qu’au moins 70% des aliments contiennent des microbes?
En 2002, une étude du chercheur ghanéen Patience Mensah, publiée dans le bulletin de l’OMS a révélé qu’Accra, au moins 70% des échantillons d’aliments prélevés chez les vendeuses de rue contenaient des microbes. Au Mali, les services de sécurité sanitaire des alimentaires sont de plus en plus préoccupés par le phénomène de l’alimentation de rue à Bamako. Dr. Mohammed Ag Bendech, Fonctionnaire principal pour l’alimentation et la nutrition pour la région Afrique à la FAO s’est penchée sur la question.
«Alimentation de rue à Bamako au Mali: problématique et approches d’intervention». C’est l’intitulé de l’étude publiée, en 2013, par Dr. Mohammed Ag Bendech dans la Revue Mali Santé Publique. A Bamako, rapporte le chercheur, 80% des familles défavorisées ont au moins un membre engagé dans la vente des aliments de rue contre respectivement 58% et 14% des familles moyennes et aisées. Les vendeuses, explique Dr Bendech, sont souvent chefs de famille qui tirent de cette activité un revenu parfois supérieur au salaire minimum.
L’alimentation de rue contribue à la « réduction des inégalités d’accès à la nourriture ». Car, la vente des aliments de rue permet d’acquérir un revenu non négligeable qui est réinvesti dans l’alimentation familiale à domicile. Selon Dr. Mohammed Ag Bendech, l’impact de l’alimentation de rue à Bamako ne s’arrête pas là. Il diffère d’une autorité à une autre. Ainsi, les services en charge de l’aménagement de l’espace urbain se préoccupent prioritairement de l’occupation des trottoirs, de l’élimination des déchets tandis que les municipalités s’interrogent sur l’attitude à adopter face à ce secteur dit informel qui échappe dans une certaine mesure aux règles de l’économie marchande. Les autorités sanitaires pensent aux risques et avantages de l’alimentation de rue en termes d’hygiène et de sécurité alimentaire et nutritionnelle.
Lire aussi – Insécurité alimentaire et nutritionnelle au Nord du Mali: le programme Key pour renforcer la résilience
Qualité hygiénique des aliments de rue et groupes à risque
« Les aliments vendus sur la voie publique sont de qualité douteuse », évalue Dr Bendech. Des intoxications ont été reportées dans plusieurs pays. Citant l’étude réalisée au Ghana, le nutritionniste estime que certains aliments vendus sur la voie publique (salade, spaghetti, omo tuo et sauce piquante) avaient des niveaux de contamination « inacceptables ». Au moins, 70% des échantillons d’aliments prélevés contenaient des microbes, rapporte-t-il. Consommés par tous, Dr Bendech explique que les enfants d’âge préscolaire des familles pauvres sont les plus exposés aux toxi-infections à cause de leur accès quasi-permanent à ces aliments. Ce groupe à risque est suivi par les écoliers du primaire.
«La vision doit être positive et constructive plutôt que répressive» |Dr Bendech
Quelle approche adoptée face à la problématique des aliments de rue? Avant toute intervention tendant à améliorer la situation, Dr Bendech estime qu’il est important de reconnaître la responsabilité des municipalités dans le contrôle, le soutien et la coordination des actions en lien avec le secteur informel de l’alimentation. Il est aussi important, ajoute-t-il, de faire émerger une vision commune de tous les acteurs concernés par l’alimentation de rue. «Cette vision doit être positive et constructive plutôt que « répressive».
Pour l’amélioration de la qualité hygiénique et nutritionnelle des aliments et la protection du consommateur, Dr Bendech estime qu’il faut améliorer les revenus des vendeuses par l’accès au micro-crédit. Par contre, indique-t-il, la question du cadre légal pour le secteur informel de l’alimentation doit être appréhendée avec beaucoup de souplesse et d’innovations pour éviter la rupture de l’équilibre actuel.
@mamadou_togola